27/03/2009 Texte

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Le Caire boude les 30 ans du traité de paix israélo-égyptien

Le 26 mars 1979 à Washington, le président égyptien Anouar el-Sadate et son homologue israélien Menahem Begin signent officiellement un traité de paix, sous l'égide du président américain Jimmy Carter. Ce traité a vu le jour suite aux accords de Camp David en 1978. Il accorde le plein exercice de la souveraineté égyptienne jusqu’à la frontière internationalement reconnue entre l’Égypte et la Palestine sous mandat, impose le retrait des forces armées israéliennes du Sinaï et donne le droit de libre passage aux navires d’Israël dans le canal de Suez sur la base de la Convention de Constantinople de 1883. A l’occasion des 30 ans du traité, le président israélien Shimon Pérès a téléphoné à son homologue égyptien Hosni Moubarak. Mais l’Égypte a annoncé qu’elle ne fêterait pas cet anniversaire. Pourquoi l’Egypte a-t-elle décidé de ne pas célébrer les 30 ans du traité de paix israélo-égyptien ? Antoine Basbous: Parce que le conflit de Gaza est passé par là. L’Egypte a une opinion publique qu’elle doit respecter. Elle n'a pas à célébrer une paix avec un voisin qui vient de faire tant de victimes chez les Palestiniens. Par ailleurs, la paix entre les deux pays est restée une "paix froide". Si les échanges entres les officiels des deux pays se sont multipliés depuis, les échanges entre les peuples sont restés peu fréquents. Peu d’Egyptiens se rendent en Israël. Ceux qui s'y rendent sont souvent perçus comme des traîtres. Les Egyptiens considèrent que la paix ne prendra tout son sens que lorsqu'elle sera signée avec tous les pays arabes. Quel bilan peut-on tirer de ce traité 30 ans après ? A. B.: Israël a beaucoup gagné avec ce traité qui a imposé à l’Egypte des restrictions militaires dans le Sinaï récupéré. En effet, l’Egypte ne peut pas faire entrer autant de soldats qu’elle le souhaite. Ainsi, Israël fixe des limites géographiques et numériques à l’engagement militaire égyptien. L'Etat hébreu a ainsi réussi à neutraliser la plus grande puissance militaire arabe, qui héberge le siège de la Ligue arabe. De son côté, l’Egypte, grâce à ce traité, a pu récupérer des gisements pétroliers et vendre du gaz à Israël avec des tarifs apparemment préférentiels par rapport au marché international. Les chiffres à ce sujet restent secrets par ce que l’Egypte craint la réaction de l’opposition si cette information s’avérait exacte. L’Egypte bénéficie d'une aide américaine annuelle, près de deux milliards de dollars. Elle ne peut pas s’en passer. Le traité de Camp David est dénoncé par une partie de l'opinion publique arabe qui préfère une ligne dure et démagogique comme celle de l’Iran face à Israël et aux Américains. Quel avenir peut-on prédire à ce traité, notamment avec le nouveau gouvernement israélien et la pression de la rue arabe pour rompre cet accord ? A. B.: La paix instaurée par ce traité restera une paix froide tant qu’elle n'intègre pas les Palestiniens. L’entrée au prochain gouvernement israélien de Avidgor Liberman (extrême droite) - qui avait menacé de bombarder le barrage d’Assouan et a manqué de respect au président Hosni Moubarak - risque de rendre la situation plus compliquée. Les relations peuvent passer de la "fraicheur" à une "congélation" temporaire. Néanmoins les deux pays ont des intérêts communs. Ils n’ont surtout pas intérêt à ce que le Hamas contrôle les Territoires palestiniens. Ils ne veulent pas d’un succès de l’Iran dans la région, ni de celui des Frères musulmans en Egypte. Toutefois, ils ne peuvent pas afficher leur entente objective. En ce qui concerne la "rue arabe", elle ne peut pas conduire à la rupture de ce traité.

OBSERVATOIRE DES PAYS ARABES
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